Mérovingiens : 481 – 768 et Carolingiens : 768 -987
L’accueil des voyageurs a toujours existé que ce soient des marchands ou des invités. Cependant, après l’effondrement de l’Empire romain et de son économie monétaire, l’hospitalité archaïque a repris tous ses droits dans le monde barbare. Durant cette période et jusqu’à une date avancée du XIe siècle, on retrouve la coutume où hôte et visiteur sont intimement liés, ce qui signifie que l’invité devient un « membre de la famille », et est contraint d’abonder dans le sens de la famille d’accueil comme les querelles et le devoir de vengeance privée. Héberger un hôte de passage est une obligation. L’hospitalité complète, à titre amical, est l’apanage de la noblesse, à contrario, l’hospitalité « primitive », excluant la nourriture concerne les pèlerins, les marchands et autres voyageurs. Ils s’approvisionnent dans les marchés, très rares à cette époque, ou dans les tavernes qui ne sont pas non plus très nombreuses. Ce manque de lieux d’hébergement et de ravitaillement se fait cruellement sentir. A tel point, que l’hospitalité obligatoire est imposée par les gens de pouvoir durant leurs déplacements administratifs. Les paysans se voient contraints de leur fournir logement et nourriture. Les monastères ont même dû enfreindre certaines règles de leur communauté pour ouvrir leur porte à des voyageurs démunis et ont créé des hospices monastiques. Les tavernes, quasi inexistantes durant les grandes invasions, commencent à prospérer vers la fin des carolingiens, dans les villes, les ports, les lieux de pèlerinage et aux étapes, afin d’assurer les besoins de première nécessité, comme le vin et la bière !
Capétiens : 987 – 1328
A partir du XIe siècle, sous l’effet du développement économique et de l’essor du grand commerce international, l’accroissement des lieux d’hébergement explose. Les paysans sont toujours contraints de loger et de nourrir le voyageur, qui en contrepartie n’a pas le droit d’utiliser la force et doit s’acquitter d’une somme d’argent fixée par les personnes établies dans la localité. Autant dire que l’application de ces nouvelles règles n’a pas été commode à vérifier, ce qui a entre-autres favorisé la multiplication des tavernes au bord des routes. Durant tout le Moyen-Age, on voit ainsi apparaître des auberges dans les villes, les villages et le long des grandes voies de communication qui ne se contentent plus de fournir le vivre mais également le gîte. A Paris, un registre fiscal de 1313 en décompte plus de 500 soit un débit de boisson pour 410 habitants. Ces lieux où l’on retrouve majoritairement la gent masculine (la gent féminine présente étant de « petite vertu ») se voit le lieu de complot, de rixe ou toute autre débauche. Les hôtelleries jouissent d’une meilleure réputation.
Dans la campagne, autour d’elles se développent parfois des villages entiers, voire des villes.
Les grands négociants surtout ont pris l’habitude de descendre dans des maisons de commerce, dont l’hôte ne se contente pas de pourvoir à leur subsistance, mais joue l’intermédiaire en leur proposant des affaires intéressantes. En échange, ils lui versent des droits de courtage et lui rendent la pareille dans leur ville. Les relations étroites entre l’hôte et le visiteur qui existaient avant le Xe siècle disparaissent. Désormais la protection des étrangers appartient aux seigneurs, aux États et aux communautés. Dans les villes, des demeures privées se transforment petit-à-petit en maison d’hôte payante et accueillent des visiteurs de qualité.
L’aménagement des auberges est très différent en fonction de la catégorie sociale. Les moins aisés se retrouvent dans des maisons de pierre ou de bois d’une seule pièce, où les hommes, les bêtes se côtoient. D’autres demeures, plus aisées, se composent de bâtiments construits spécialement à cette fin, autour d’une cour intérieure, un rez de chaussée abrite les écuries et les entrepôts, tandis qu’au premier étage se trouvent les pièces de séjour et les chambres à coucher.
La restauration ne concerne pas que les voyageurs. Principalement dans les villes, la population se complet à acheter de quoi se restaurer à la sauvette.
Le fast food médiéval : eh oui, même si Mac Donald n’était pas encore implanté, les citoyens des villes, les voyageurs aiment à se restaurer dans des auberges ou encore acheter à de nombreux marchands ambulants, aussi bien des plats cuisinés, que des douceurs. Ce phénomène semble être répandu et très à la mode. Les marchands fixes ou ambulants crient à tue-tête pour vendre leurs produits. Quel brouhaha il devait y avoir dans les rues…
Un autre lieu de vente prend de l’essor, le marché. Ce n’est certes pas qu’un lieu d’approvisionnement alimentaire, les marchands sont aussi nombreux que variés mais c’est là que la commère vient se procurer les produits dont elle a besoin. Ils sont bien achalandés et chacun peut venir y vendre sa production, du simple paysan ou gros négociant.
Ces marchés sont réglementés. Tout d’abord, le commerçant doit s’acquitter d’un droit d’entrée sur les marchandises, puis un prix maximum pour la revente des produits est fixé par la localité. Gare à celui qui enfreint le règlement, les gens d’arme ne sont jamais très loin ! Dans les marchés, les différentes catégories d’artisans se regroupent, ainsi il est plus facile de trouver le produit que l’on cherche. Cette géographie a également pour but de protéger le consommateur des nombreuses fraudes, et facilite le contrôle. Le risque de tromperie est omniprésent, c’est pourquoi les officiers veillent au poids des denrées, à leur qualité, à leur prix.
Valois Direct : 1328 - 1498
Durant cette période, peu d’évolution par rapport à l’époque capétienne, la guerre de cent ans a fait son œuvre. Effectivement, non pas que les voyageurs ont disparu mais ils se sont raréfiés au vu du peu de sécurité dans le pays.
Valois d’Orléans : 1498 – 1515
Une fois de plus, en seulement 17 ans de règne de Louis XII (né le 27 juin 1462, mort le 1er janvier 1515, roi de France), pas de changement spectaculaire entre les Valois Direct et les Valois d’Angoulême, si ce n’est qu’avec la fin de la guerre de cent ans, la vie économique du pays reprend son souffle.
Valois d’Angoulême : 1515 – 1589
En ville, toute une industrie de mets à emporter se met en place. Les fringales sont ainsi calmées par tout un ensemble de traiteurs. On peut s’arrêter pour savourer des pâtés ou des pièces rôties tous chauds, des « oublier », des gaufres… Mais si l’on veut faire un vrai repas, il vaut mieux se rendre dans une taverne ou une auberge.
La maison d’hôte se distingue nettement de l’hôtel. Cette dernière demeure privée, n’accueille que les hôtes de son choix et le maître de maison s’autorise le droit de fermer sa porte à qui ne lui convient pas ! Libre également au propriétaire de gérer ses tarifs.
Pour l’hôtel et la taverne, c’est différent. Des statuts stricts sont mis en place par les autorités. L’hôtelier et le tavernier sont des représentants de l’autorité publique. Ils doivent se signaler par une marque distincte identifiable par les étrangers. Celle-ci peut se distinguer, un peu comme au début du Moyen-Age, par un rameau vert, une couronne, un cercle de tonneau ou des banderoles. Ces quelques signes ne suffisent cependant pas à distinguer tous ces établissements, ils se sont donc complétés par une grande diversité de noms et d’enseignes individuels. On trouve ainsi des noms de saints, des symboles du droit, des créatures fabuleuses, des animaux de toute sortes, des armes de propriétaires ou de seigneurs locaux.
Les règlements municipaux imposent aux hôteliers un nombre limite de clients en fonction de sa capacité (ce qui peut varier selon le lieu en générale à une vingtaine de clients, le maximum n’excédant pas 60). Lorsque l’établissement est complet, l’enseigne est retirée. Tant qu’ils ne sont pas complets, ils n’ont pas le droit de refuser le gîte et le couvert au demandeur. Ils ne doivent pas non plus racoler dans la rue pour attirer le chaland ! Désormais, le voyageur doit montrer « patte blanche ». L’hôtelier doit remplir la liste de ses clients et la remettre aux autorités compétentes. Les hôtels, non seulement, proposent le gîte et le couvert mais également peuvent distribuer le vin et la bière. Ce qui, bien entendu, est une source de revenu non négligeable, mais pas que pour les aubergistes également pour les pouvoirs publics qui ne sont pas avares en impôt !
A présent, les hôtels proposent des chambres individuelles que l’on peut fermer avec une clef. Les chambres se composent non seulement d’un lit mais d’armoires. Ce confort permet au visiteur de rester un certain temps. Surtout, que parfois des étudiants ou des travailleurs n’ont que cette solution pour se loger. Les salles de séjour et les salles à manger sont meublées plus ou moins confortablement.
Le nombre d’hôtels est très variable en fonction des lieux. On peut passer de la simple maison isolée au bord de la route à un chiffre de 2 et 10 dans les gros villages et les petites bourgades, à une vingtaine dans les villes moyennes, tandis que dans les grandes villes on en compte entre quarante et cent.
Il existe toujours des débits de boisson où l’on vient surtout déguster une bonne piquette, jouer aux cartes, se quereller et refaire le monde… Ces lieux n’ont pas changé des époques précédentes.
Bourbons : 1589-1791
Les hôtels ont pris leur essor, c’est au tour des restaurants et des cafés de naître.
C’est sous le règne de Louis XIV (né le 5 septembre 1638, mort le 1er septembre 1715, roi de France) que naissent les cafés luxueux et mondains tels que nous les connaissons aujourd’hui. Le précurseur est le Procope, dont le propriétaire le Florentin Francesco Procopio di Coltelli ouvre les portes en 1686. On y déguste le thé, le café, le chocolat, la bière, les glaces, les biscuits, les confitures dans un cadre agréable et luxueux (tables en marbres, lustre, glaces et tapisseries). Avec l’arrivée des boissons exotiques, bon nombre de cafés vont voir le jour.
A la fin du règne de Louis XV (né le 15 février 1710, mort le 10 mai 1774, roi de France) apparaît à Paris un nouveau lieu de restauration hors du foyer : le restaurant. La légende raconte qu’un dénommé Boulanger inscrit en 1765 une nouvelle enseigne : « Boulanger débite des restaurants divins ». Les pâtissiers-traiteurs le mènent en justice, estimant que ce Boulanger piétine leur plate-bande. Leur demande est déboutée. A la suite de cet exemple, d’autres échoppes commencent à servir sur de petites tables un bouillon « revigorant », appelé « restaurant ». On gardera le nom de ce plat unique. Ces nouvelles échoppes servent à toute heure et se multiplient.
Puis le restaurant va évoluer. Il va devenir un lieu élégant avec des salons particuliers. Assis à une table individuelle, le client choisit à la carte une portion d’un met dont le prix est précisé. Destiné aux élites, ce lieu imite le cérémonial de la cour, d’où la masculinité du personnel en cuisine et en salle. A la fin du repas, la carte payante (notre addition) est apportée au client.
A la Révolution française, les cuisiniers et chefs au service de l’aristocratie se retrouvent « au chômage ». Forcément, beaucoup de leurs employeurs ont « gouté à la guillotine ! ». Certains ouvrent leurs propres restaurants pour satisfaire leur nouvelle clientèle avide de raffinement : la bourgeoisie montante.